Afrique du Sud – Musique de Libertés Concerts et Exposition, la Grande Halle de la Villette, 1995

Welcome – Bienvenue !

 

Rina Sherman, 15 min, 1995
Film d’archives présenté sur grand écran
à l’entrée du parcours audiovisuel de l’exposition

Commissaire : Rina Sherman

Walahi-Wo!


Film concert, 1995
avec Hugh Masakela, Dolly Rathebe, Dorothy Masuku, Mara Louw, le tromboniste Jonas Gwangwa, le saxophoniste Peter Mokonotela

et une compagnie de trente musiciens sud-africains

Production et réalisation : Rina Sherman

Dans le cadre de la manifestation « Afrique du Sud, musiques de liberté », j’étais commissaire du parcours audiovisuel, dont une présentation d’images d’archives proposée sur grand écran à l’entrée de la Grande Halle.

Cette présentation, Welcome – Bienvenue, était composée d’images ou de séquences de films sur l’Afrique du Sud. La direction de la manifestation avait obtenu l’autorisation des ayants droit (réalisateurs et ou producteurs) pour l’utilisation de leurs images pour cette présentation pour un usage non commercial.

Cette présentation figure ici comme une simple trace de mon travail et n’avait pas été où n’est en rien commercialisé. Elle est disponible uniquement sur ce site consacré à mon travail. Les noms des ayants droit des différents films figurent dans le générique de fin de la présentation.

 

For the Exhibition Afrique du Sud, Musiques de liberté (Grande Halle de La Villette in Paris, May 1995), I was curator of the audiovisual displays, of which a presentation of archival images displayed on a large screen at the entrance of la Grande Halle.

This presentation, Welcome – Bienvenue, was composed of images or sequences from films on South Africa. The management of the exhibition had acquired permissions from the rights owners (Directors and or producers) for using their images for this presentation for non-commercial usage.

This presentation figures here as a simple trace of my work and has never been commercialised in any way. It is made available only on this Web site dedicated to my work. The names of the rights owners are listed in the end credits of the presentation.

Excerpt: Nkosi sikelel’ iAfrika

Au programme du concert :

Zulu piano medley No 1, part. 1 (Compositeur interprète Thomas MABILETSA)
Mbube
Meadowlands (Interprète JACOBS Nancy and her Sisters)
Unomeva
Jikela emaweni (Interprète MANHATTAN BROTHERS)
Ufikizolo (Auteur Compositeur Interprete Dorothy MASUKA)
Something new in Africa
Uile ngoan’a batho
King Kong (Chant Nathan MDLEDLE)
Diepkloof ekhaya (Interprète Jazz dazzlers, The)
Vary-oo-vum (Interprète Jazz Epistles, The)
Midnight ska (interprète Reggie Msomi’s Hollywood Jazz band)
Mama Thula (Interprète Mahlathini and Mahotella Queens)
Ngikhala ngiya baleka (Interprète MAKHONA TSOHLE BAND)
Mkatakata (Auteur Compositeur Interprete John RAMOTSIE)
Buya Uz’ekhaya
Bayeza
Thakane
Rubbing sand in my eyes (Interprète Stimela)
Keep on knocking (Auteur Compositeur Interprete Lucky Dube)
Fountain (Auteur interprète Vusi Mahlasela)
Nkosi sikelel’ iAfrika (Auteur : Enoch Mankayi Sontonga)
Woza friday

Fresque sud-africaine à La Villette

L’humanité, le 24 mai 1995

Un an après la victoire de Nelson Mandela, la nouvelle Afrique du Sud est célébrée à la Grande Halle de La Villette, jusqu’au 75 juin. Avec la récente compilation « African Solution », on est également conviés à un voyage à travers les époques et les styles.

Aux temps les plus durs de l’apartheid, la musique a toujours joué un rôle catalyseur dans la résistance populaire. Comme l’écrit à juste titre Denis-Constant Martin, conseiller artistique du festival de La Villette, « c’est le plus grand paradoxe de l’Afrique du Sud que nous conte la musique : dans le pays où la ségrégation raciale a été le plus longtemps, le plus minutieusement, institutionnalisée, il n’y a de culture vivante que métissée ».

« L’élection d’un président qui a fait vingt-sept ans de prison, c’est exceptionnel, on avait envie de fêter ça », explique Bertrand Collette, responsable du projet. « Quand on va en Afrique du Sud, les mythes tombent devant la réalité : un pays où, prétendument, il n’y aurait plus d’apartheid… L’apartheid social, celui qui est lié à la différence de richesse, est extrêmement fort. J’étais choqué de constater que Soweto, ville de plusieurs millions d’habitants, se situant à treize kilomètres du centre de Johannesburg, n’est même pas indiqué sur les panneaux ! »

Le célèbre trompettiste Hugh Masekela, exilé et engagé, à l’instar de son ex-épouse Miriam Makeba, dans une lutte infatigable, est rentré au pays et transmet son expérience à la jeunesse. Le retour des exilés a donné un coup de fouet. Le niveau musical est élevé. A la différence de bien d’autres pays du continent, il existe des studios d’enregistrement et des structures qui permettent à l’industrie musicale de se développer. A la Grande Halle de La Villette, c’est ce foisonnement culturel qui est réflété, avec la participation de 100 artistes.

De 19 heures à 24 heures, selon un parcours scénographié et autour de trois scènes, le spectateur peut écouter de la musique et de la poésie, regarder une expo photos, des images d’archives et des films, savourer au restaurant des spécialités du pays. Dans un shebeen reconstitué – bar interdit sous l’apartheid -, Vusi Mahlasela délivre ses mélopées aériennes. Sur la grande scène, un big band, dirigé par Hugh Masekela, rassemble trente des meilleurs musiciens de la place, toutes générations et tous styles confondus : le tromboniste Jonas Gwangwa, le saxophoniste Peter Mokonotela, la chanteuse Dolly Rathaebe, sorte d’Ella Fitzgerald des townships, qu’avait enlevé un « tsotsi » (bandit) éperdu d’amour (1)…

Le grand orchestre nous promène au fil des genres, de la kwela (musique de rue avec flûte et guitare), au rythme enjoué mbaqanga, du jazz aux fameux choeurs masculins, du marabi (style urbain apparu dans les années vingt dans les shebeens) à la fusion moderne.

Le CD « African Solution » illustre cette diversité (2). Il inclut un extrait de la dernière comédie musicale (« African Solution ») de Mbongeni Ngema, artiste de renom (musicien, acteur, auteur et metteur en scène). Trois Tony Awards l’ont récompensé en 1988, pour la composition, la chorégraphie et la mise en scène de la comédie musicale « Sarafina ». Sur une autre plage, le chanteur-guitariste Ihashi Elimhlophe marie le chant zoulou à un jeu de guitares obsédant. La luxuriance polyphonique est présentée par des choeurs (IPCC et New South Africa), tandis que le flambeau du reggae est porté par Free At Last (groupe coqueluche de la jeunesse noire, comprenant des musiciens de Lucky Dube) et par le chantre rasta Jumbo. Le chanteur afrikaner Johannes Kerkorrel (invité à La Villette le 9 juin) projette sa rébellion dans un rock galvanisant. La compilation rend hommage aux anciens. Les Dark City Sisters ont chanté, dans les années cinquante, un cocktail de marabi et boogie-woogie.

Egalement présents dans ce parcours discographique, les Soul Brothers. Fondé en 1974, ce groupe, qui a enregistré 23 disques, est un des plus gros vendeurs de galette vinylique par centaines de milliers d’exemplaires. Il n’a cessé de promouvoir le mbaqanga, sorte de blues sud-africain dont le nom désigne, en zoulou, un pain de maïs : une façon d’exprimer que le mbaqanga constitue l’aliment de base de la culture populaire. Lorsque j’avais rencontré, en Afrique du Sud, au milieu des années quatre-vingt, Moses Ngwenya, pianiste et coleader des Soul Brothers, il m’avait confié : « Avec le mbaqanga, nous restons attachés à notre peuple. Nous venons de familles pauvres. Nous ne savons pas lire ni écrire la musique. Nous sommes autodidactes. Au début, nous avons commencé par copier la pop occidentale. Jusqu’au jour où nous avons eu conscience de la force de notre culture et qu’il fallait absolument garder celle-ci vivante. » Les Soul Brothers sont au nombre des invités prestigieux que reçoit chaque soir le big band et se produiront ce soir. Un événement. Ils n’avaient jamais joué en France.

(1) Invités : ce soir, Soul Brothers ; 23, 24, 27 et 28 mai ; Johannes Kerkorrel 25 et 26 ; 1er et 2 juin, Dolly Rathaebe et Dorothy Masuka ; 3, 4 et 5, Mahlathini & Mahotella Queens ; 7 et 8, Johnny Clegg et Sipho Mchunu ; 9, 10 et 75 juin, Sibongele Khumalo. Renseignements : 40.03.75.33.

(2) CD : « Soul Brothers, Jump and Jive » (Earthworks) ; « Wusi Mahlashela, Wisdom of for Giveness (Indigo Label bleu / Harmonia Mundi) ; « African Solution » (Indigo Label bleu / Harmonia Mundi).

Fara C.

Afrique du Sud, musiques de liberté

« Il n’est pas question de vengeance »

Le programme, plus de trente musiciens chaque soir jusqu’au 75 juin, commenté par Barbara Masekela, sœur de l’organisateur et ambassadrice.
LEE Hélène

Afrique du Sud, musiques de liberté
La Grande Halle de La Villette
Libération

 

Panorama des courants culturels qui, pendant les années d’apartheid, ont aidé à la survie morale d’un peuple, le festival prend la forme d’une grande célébration autour de quelques groupes phares (ce soir et jusqu’au 28 les Soul Brothers, rois de la soul-mbaquanga).
 
La composition du plateau (les plus grands noms de la scène jazz, pop et folk locale) témoigne d’un éclectisme à l’honneur de son maître d’œuvre, le trompettiste de jazz Hugh Masekela : des artistes restés au pays et des exilés comme Jonas Gwangwa, chef de l’orchestre de l’ANC ; des Noirs et des Blancs comme Johannes Kerkorrel, le militant punk afrikaner; des jazzmen et des pop stars… personne n’a été oublié. Une bonne nouvelle: il y a quelques années, dans le désespoir de l’exil, des militants menaçaient de représailles artistes ou maisons de disques qui avaient continué à fonctionner au pays.
 
Une idée que repousse Barbara Masekela, ambassadrice d’Afrique du Sud en France et sœur du grand trompettiste. « Nous sommes un gouvernement démocratique! L’une des choses pour lesquelles nous nous sommes battus, est la charte des droits de l’homme: nous n’allons pas pratiquer ce que nous avons combattu! Nous sommes un gouvernement de réconciliation nationale, il n’est pas question de vengeance.»
 
Pourtant, jusqu’aux années 70, les maisons de disques n’ont pas versé aux artistes de droits d’auteur ou de royalties. On avait pu parler de nationaliser Gallo, la plus puissante, ce qui fait sourire Barbara Masekela : « Pas question de nationaliser dans aucune branche de l’industrie.
 
La Constitution est claire: les droits doivent être protégés, y compris celui de créer et d’être rémunéré pour ce que l’on a créé. Nous nous opposerons à ce que l’on dépouille Gallo, ou tout autre société en activité, du produit de ses efforts. Quant aux droits dus depuis des années, je ne pense pas que l’on doive entamer une procédure collective. La Constitution garantit les droits des individus, les artistes doivent récupérer leur dû. »
 
Reste le sous-développement des quartiers noirs en matière de structures : « Les salles de spectacle n’ont pas poussé dans la nuit ; il n’y a pas un seul club à Soweto, qui compte plus de deux millions d’habitants. » Il faudra aussi recadrer la politique culturelle des conseils des arts, jusqu’ici au service de la minorité: «Le gouvernement a fait savoir qu’il ne s’opposait pas aux expressions culturelles eurocentristes: beaucoup d’Africains se passionnent pour l’opéra ou le ballet.
 
Mais un monde de culture africaine s’est sclérosé, relégué aux manifestations touristiques, il faut le développer.» Un des effets les plus curieux de la fin du boycott est l’arrivée des musiciens du reste de l’Afrique: « La venue de Salif Keita ou de Manu Dibango ont été des événements. Pendant des siècles, nous avons été séparés artificiellement du reste de l’Afrique.
 
Actuellement, nous découvrons la culture de ce continent. Nous sommes en train de devenir Africains. » L’afflux soudain d’étrangers enlève aux artistes locaux une part juteuse du marché et crée un problème d’emploi. Auquel s’ajoute celui des multinationales, qui mettent de gros moyens derrière les produits anglo-saxons au détriment des produits locaux.
 
Aussi y a-t-il eu, ces derniers mois, un mouvement pour imposer aux radios et télévisions un quota de productions sud-africaines. Ce protectionnisme ne s’étendra pas à l’Afrique, et les artistes du reste du continent seront, comme ailleurs, relégués dans la marge des « produits étrangers », en concurrence avec la grosse production américaine. Autrement dit : situation normale. RAS
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